Thierry Millogo : transmettre l’héritage culturel africain à travers les mots

Thierry Millogo : transmettre l’héritage culturel africain à travers les mots
Rabat, 6 mai 2025 – L’écrivain burkinabè Thierry Millogo a réaffirmé son engagement à préserver et transmettre l’identité culturelle africaine à travers la littérature, lors de son intervention au Salon international de l’édition et du livre (SIEL) de Rabat. Il a exprimé son inquiétude face à l’effacement progressif des langues et traditions africaines, qu’il souhaite revitaliser pour les jeunes générations.
Dans son allocution sur le thème « Parcours littéraires et intellectuels croisés », Thierry Millogo a rappelé la richesse exceptionnelle du continent africain, abritant plus de 3 000 groupes ethniques et 2 000 langues, dont une soixantaine sont encore parlées au Burkina Faso.
Originaire de Bobo-Dioulasso, Millogo dit avoir été profondément marqué par une éducation ancrée dans les valeurs spirituelles et ancestrales. Il raconte avoir grandi dans un environnement dominé par le culte du Do et la croyance inébranlable en le lien vivant entre les ancêtres et les vivants. La colonisation, selon lui, a gravement porté atteinte à cet héritage, mais certaines communautés, comme les Bôbôs, ont su préserver l’essentiel de leurs traditions.
À travers ses ouvrages, Le Principe favorable (2023) et Devenir un ancêtre (2024), il tente de raviver la mémoire collective et d’initier les jeunes à une compréhension profonde des rites, des interdits et des règles qui structuraient la société traditionnelle. Ces écrits, centrés sur le « pacte des ancêtres », dévoilent les fondements d’une organisation sociale où l’équilibre du groupe prime sur l’individu.
Il y décrit un code ancestral où chaque transgression – qu’elle porte atteinte à l’unité familiale ou à l’harmonie collective – peut entraîner des sanctions spirituelles lourdes, jusqu’à l’exclusion. Il évoque aussi les principes régissant le mariage traditionnel, conditionné à la continuité de la lignée.
Pour Millogo, la renaissance africaine passe par une réappropriation des langues locales. Il plaide en faveur de leur usage dans les systèmes éducatifs, soulignant qu’« en perdant nos langues, nous avons brisé le fil de notre liberté ». Il appelle ainsi à un sursaut culturel et identitaire : « L’Afrique doit réveiller sa conscience par la langue et la culture. C’est là notre seul chemin vers l’émancipation. »
Thierry Millogo, fondateur de la maison d’édition Mercury, a représenté le Burkina Faso au SIEL 2025 aux côtés de Bernadette Sanou/Dao, ancienne ministre de la Culture sous la Révolution. Leur participation a été saluée par l’ambassadeur burkinabè au Maroc, Mamadou Coulibaly, qui a visité le stand de Mercury et ceux d’une dizaine d’éditeurs venus de l’Alliance des États du Sahel.
La 30ᵉ édition du SIEL, placée sous le Haut Patronage du Roi Mohammed VI, s’est tenue du 18 au 27 avril à Rabat, rassemblant 756 exposants issus de 51 pays, dans une célébration de la diversité culturelle et de la parole littéraire.