Ghana-AES : les premiers signaux d’un rapprochement
Ghana-AES : les premiers signaux d’un rapprochement
Sous Nana Akufo-Addo, le Ghana, comme le Bénin et la Côte d’Ivoire, était critiqué par les « pro-AES » pour sa position face aux pouvoirs militaires du Mali, du Niger et du Burkina Faso. Mais avec l’élection de John Mahama, un changement d’attitude semble se dessiner.
L’image a rapidement circulé sur les réseaux sociaux. Le mardi 7 janvier 2025, le président du Burkina Faso, le capitaine Ibrahim Traoré, figurait parmi les invités de marque à l’investiture de John Dramani Mahama, nouveau président élu du Ghana.
Fidèle à son image, le dirigeant burkinabè est apparu en uniforme militaire, arme à la ceinture, affichant un sourire détendu. Il était accompagné de sa garde rapprochée pour marquer sa présence à cette cérémonie. Les trois chefs d’Etat de l’Alliance des Etats du Sahel (AES) ont tous été conviés par Accra, mais Assimi Goïta (Mali) et Abdourahmane Tiani (Niger) ont préféré se faire représenter par des membres de leurs gouvernements.
Si rien n’a filtré des échanges entre Ibrahim Traoré et John Mahama, cette invitation est perçue comme un geste fort du président ghanéen en faveur d’un apaisement des tensions avec l’AES, voire d’un rapprochement stratégique. Lors de la remise officielle de l’invitation à Assimi Goïta, la délégation ghanéenne avait d’ailleurs souligné devant la presse la volonté du nouveau chef d’Etat de renforcer les liens avec cette organisation. Certes, aucune décision concrète n’a encore été annoncée, mais la réponse positive des trois pays sahéliens à l’invitation de John Mahama est un signal que beaucoup d’observateurs jugent encourageant pour l’évolution des relations diplomatiques entre Accra et le Liptako-Gourma.
Rappelons que le Ghana est l’un des piliers de la CEDEAO, organisation dont le Mali, le Niger et le Burkina Faso ont annoncé leur retrait en 2024, avec une entrée en vigueur prévue dès ce mois de janvier. Malgré cette rupture institutionnelle, les trois pays ont toutefois affirmé leur volonté de maintenir une zone de libre circulation pour les citoyens des pays membres de la communauté souhaitant se rendre dans l’AES. Une initiative qui, pour l’instant, n’a pas suscité de réaction officielle de la part des dirigeants ouest-africains.
En tout état de cause, cette sortie de la CEDEAO ne devrait pas impacter immédiatement les ressortissants de l’AES installés au Ghana. En effet, aux côtés du Bénin, Accra fait partie des rares pays de la région à offrir une exemption de visa à tous les citoyens africains, indépendamment de leur appartenance à la CEDEAO. Toutefois, des discussions sur la circulation des marchandises et les conditions de régularisation des citoyens installés de part et d’autre des frontières pourraient émerger dans les mois à venir.
Un contexte régional en mutation
Le Ghana n’est pas le seul pays à afficher une volonté de dialogue avec l’AES. Le Bénin, malgré ses tensions avec le Niger qui l’accuse de vouloir le déstabiliser, continue de plaider pour la coopération avec l’organisation sahélienne. De son côté, le Togo s’est rapidement positionné comme un médiateur naturel entre la CEDEAO et l’AES, multipliant les échanges avec les dirigeants militaires.
Dans ce contexte de recomposition des alliances, la présence d’Ibrahim Traoré à Accra et l’attitude d’ouverture du Ghana ne sont pas anodines. Elles pourraient marquer le début d’une nouvelle dynamique entre la confédération et certains de ses anciens partenaires de la CEDEAO. Une question désormais en suspens : jusqu’où ce rapprochement ira-t-il ?